Le Testimonium Flavianum de Flavius Josèphe

6. Synthèse

Un faux ?
Les "preuves" d'une interpolation ne tiennent pas !
De toutes ces réflexions, à rebours de la grande majorité des avis présents sur le web, les arguments qui affirment  que le Testimonium est un faux ou un texte trafiqué ne résistent pas à une analyse approfondie et objective :
  • Le principal argument en faveur de l’interpolation est que Josèphe, qui se dit pharisien et prêtre ne peut avoir écrit un texte aussi peu critique sur Jésus et les chrétiens. Mais la vie de Josèphe montre tout autre chose. Lui même se présente aussi comme un général, et c'est bien ce ce que montre les écrits de Josèphe : une vie de chef de guerre, d’homme politique, d'écrivain. C’est un nationaliste juif pragmatique mais pas un religieux.
  • L'argument qui consiste à dire que jamais Josèphe n'aurait parlé de Jésus en disant c'était le « Christ  » donc le « Messie » repose sur des bases fausses. Au premier siècle, le nom de Jésus est inconnu dans l'empire. Les personnes cultivées auxquelles s'adresse Josèphe ont entendu parler du Christ comme l'instigateur d'une nouvelle religion dont les fidèles sont appelés chrétiens. Dans ce contexte, Josèphe se devait de préciser dans le Testimonium que Jésus est l’homme que certains connaissent sous le nom de Christ.
  • Les idées sous-jacentes au Testimonium, en particulier la résurrection des morts ou la possibilité de signes merveilleux, sont bien celles que partagent Josèphe.
  • Josèphe, dans un passage du livre XX des Antiquités, mentionne la mort du premier évêque de Jérusalem (Jacques frère de Jésus appelé le Christ, termes utilisés par Josèphe), et fait état d'une convergence de vue entre pharisiens et chrétiens. Aucun reproche, aucune critique n'est adressé aux chrétiens dans ce passage et montre que Josèphe n'est pas un adversaire des chrétiens.
  • Les études linguistiques développées surtout par les tenants de l'interpolation totale sont contradictoires, biaisées et rejetées par les tenants de l'interpolation partielle comme par ceux qui penchent pour l'authenticité. Ces études ne tiennent pas compte du fait que Josèphe est souvent confus et son grec très imparfait.
  • L'hypothèse communément avancée est que le Testimonium a été ajouté ou modifié par des Chrétiens à la fin du IIIe siècle, puisqu'il est cité par d'autres auteurs du début IVème siècle. Une falsification à cette époque aurait été très difficile à réaliser en raison des persécutions, l'édit de tolérance de Constantin ayant été promulgué en 313. Et quelles seraient les raisons de faire passer une texte minimaliste et contenant des phrases aberrantes pour un chrétien à la fin du IIIe siècle ?
  • Comment se fait-il que nous n’ayons retrouvé aucune version du livre XVIII des Antiquités en version grecque ou latine dans lequel le Testimonium n’apparait pas ou est différent ?
  • Les arguments avancés au sujet d'Origène, de Photios ou de la version arabe du Testimonium, ne resistent pas à une analyse sérieuse et objective et ne prouvent rien.
  • A contrario, si l'on se replace dans le contexte de la fin du premier siècle, si l'on veut bien entrer dans la manière de penser de Josèphe et si enfin l'on considère la difficulté qu'il y aurait à modifier des écrits publics dans l'antiquité, l'authenticité du Testimonium ne peut pas être valablement mise en cause.
Il ne faut pas oublier que Josèphe est né 6 ans après la crucifixion de Jésus et qu’il se veut un historien objectif, témoin de l’histoire des juifs. Ce qu’il pense lui-même de Jésus dans le Testimonium semble transparaitre plus explicitement dans la dernière phrase au sujet des chrétiens qui n'ont pas disparu. Pour le reste du texte, il est plus que probable que ce que dit Josèphe au sujet de Jésus, c’est ce qu’on lui a dit, peut-être ce que son Père, Mattathias, lui a dit.

Naturellement, il y a toujours cette phrase « C’était le Christ ». Nous avons expliqué qu’elle pouvait dire seulement que Jésus est le personnage connu du monde romain sous le nom de Christ, le nom de Jésus étant inconnu. Elle ne signifie pas que Jésus était pour lui le Messie. Cette explication se heurte malgré tout à une difficulté : pourquoi Jésus n’a-t-il pas dit « Il était appelé le Christ » ? Certes, nous avons expliqué que Josèphe n’en est pas à une approximation près, mais la question demeure.

Enfin, s'il est impossible d'apporter la preuve absolue que le Testimonium que nous connaissons est bien de Josèphe, il n'en demeure pas moins que nous n'avons aucune raison sérieuse, dans l'état actuel de nos connaissances, de douter que Josèphe ait écrit ces quelques phrases. Naturellement, il sera toujours possible de trouver des raisons pour dire que le Testimonium est un texte trafiqué et de réfuter les arguments présentés ici mais ce site a justement pour objecfif  d'aider chacun à vérifier l'argumentaire présenté en relisant les textes originaux sans se laisser impressionner par des affirmations péremptoires basées sur des partis pris notamment celui ci : les chrétiens seraient tous des falsificateurs prêts à tout pour justifier les évangiles.

          


Le Testimonium Flavianum
Pourquoi un texte aussi court ?
Si le Testimonium est authentique, Flavius Josèphe n’aura donc eu que quelques mots pour Jésus. C’est bien peu pour quelqu’un qui, au dire de Josèphe, a marqué par sa parole et par ses actes, dont la résurrection a été annoncé par les prophètes et dont il reste encore des disciples 60 ans après sa mort.

Il y a trois explications possibles à un si bref paragraphe :
  • D’une part, la réputation des chrétiens dans l'empire était si terriblement négative - ce que montre les textes sur les premiers chrétiens - que les lecteurs de Josèphe, la haute société gréco-romaine cultivée, n’aurait pas compris qu’on se fasse largement l’écho d’une « croyance si détestable » selon les mots de Tacite.
  • D’autre part, Josèphe ne pouvait pas prendre de trop grands risques vis a vis des autorités et surtout de l'empereur Domitien. Une présentation plus détaillée de Jésus et des chrétiens pouvait présenter un risque et fâcher ses protecteurs.
  • Enfin, il y a ce que Josèphe savait lui même, dans les années 90, du développement des chrétiens dans l'empire. Les chrétiens que connait Josèphe sont ceux qu'il a connu à Jérusalem dans les années 60. Josèphe en 90, proche du pouvoir, ne devait avoir que peu d'informations sur les chrétiens de l'empire quand on sait que Pline le jeune, un haut fonctionnaire, découvre étonné le nombre de chrétiens en asie mineure en l'an 110. Dans ces conditions, Josèphe ne pouvait donner que peu d'importance aux chrétiens et n'avait pas de raisons de développer ce sujet dans les antiquités juives.
  
Manuscrit du 1er siècle
Pourquoi tant de débats ?

Pourquoi l’authenticité du Testimonium fait-elle l'objet de tant de débat passionné ?

C'est que cette question rejoint celle de la véracité et de l'historicité des évangiles, les miracles de Jésus, sa mort et sa résurrection. Le Testimonium pose un problème particulièrement critique pour ceux qui ne voient dans les évangiles qu'un conte pour personnes crédules, pour ceux qui estiment que Jésus n’a jamais existé mais aussi pour ceux qui ne voient en Jésus qu’un homme lumineux inspirateur d’une doctrine qui aura marqué les siècles.

Pour autant, le Testimonium n'est pas un argument décisif pour confirmer ce que raconte les évangiles au sujet de Jésus, sa grande sagesse, ses miracles et sa résurrection mais seulement un indice. Il confirme seulement ce que ses proches, ou des témoins ont déclaré et rien de plus. Mais pour certains c'est déjà beaucoup trop ! Il faut trouver tous les arguments possibles pour démontrer ce qu'est pour eux le Testimonium : un texte trafiqué et prouver ainsi au plus grand nombre qu'il s'agit d''une falsification tout en accusant au passage les chrétiens d'être des falsificateurs.

Il est vrai qu'en définitive, même si nous avons de bonnes raisons de penser que le Testimonium est authentique, il n'y a pas de certitude absolue. Notre liberté reste entière et c'est heureux. Et objectivement, la difficulté est grande pour des non-chrétiens de penser que le Testimonium Flavianum est bien de Josèphe. Et c'est aussi le cas des chrétiens qui rejettent les miracles et la résurrection de Jésus. Ce serait pour ceux-ci et ceux-la un changement de perspective radical.

A l'opposé, des chrétiens y voient une preuve de la véracité des évangiles, et voudraient faire dire à Josèphe plus qu'il ne dit. Ce que dit Josèphe dans le Testimonium ne reflète que la pensée d'un homme, finalement seul, ayant ses propres sources et son parcours. Et ce passage sur Jésus, s'il corrobore ce que disent les évangiles, fait plutôt penser qu'il ne s'agit pour Josèphe que d'un simple fait divers, certes étonnant, qui a donné naissance à un groupe en voie de disparition, mais rien de plus.

On trouve aussi sur Internet un article très intéressant qui développe des arguments similaires à ceux présentés dans cette page : ICI

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